Une pièce de théâtre documentaire et d’images et d’ombres. Rassembler les objets, les photos, les souvenirs, les projections d’un père fantasmé, en inventant les parties manquantes de l’histoire pour le faire exister jusqu’à reconstituer l’enquête vécue…
Mon père je ne l’ai jamais connu. Il a disparu de ma vie quelques mois après ma naissance. J’ai vécu mon enfance à Paris dans l’appartement familial de ma grand- mère avec ma mère et ma tante. Pourtant, l’ombre de mon père venait me troubler parfois. Tout ce que j’ai de lui, ce sont quelques photos de l’année 1975, un livre d’enfant, une lettre, une invitation à sa soutenance de DEA et quelques objets provenant du Cambodge légués d’un coup à mes 18 ans. Sur l’une des photos, il est à l’aéroport de Phnom Penh avec tous ceux qui l’ont accompagné pour son grand départ en France, grâce à une bourse d’études, le 14 novembre 1973. Sur la lettre il me décrit la boule anormale qu’il a dans le ventre pour prévenir du caractère génétique du cancer du colon. Et puis c’est tout. Je n’en saurais jamais plus.
À 30 ans, sans aucune autre nouvelle, persuadée qu’il n’est plus de ce monde, je tente de retracer l’histoire de cet homme qui a quitté le Cambodge alors dévasté par la guerre. Je me décide à partir au Cambodge. Je questionne ma famille : aucune réponse. Ma grand- mère sombre dans la maladie d’ Alzheimer. Je cherche dans les hôpitaux, fouille les registres de décès, et n’obtiens rien. J’appelle l’université de Nancy où il a obtenu son DEA et je découvre une thèse sur les champignons : il y a sur la première page une liste de remerciements.
Après quelques péripéties, je réussis à joindre une personne qui le connaît. Il me donne son adresse. Je pars pour le Cambodge. Alors que je voyage sur les traces de mon père, je reçois un mail, c’est lui. Il se trouve à Nanterre. C’est là qu’il vit depuis plus de vingt ans… à quelques centaines de mètres de l’université que j’ai fréquentée pendant mes études.
Nous nous sommes rencontrés au Buffalo Grill du centre commercial Italie 2. C’était en 2006. Je ne l’ai revu qu’une seule fois.
Finalement, il n’a pas disparu ; il n’avait jamais cessé d’être tout près. Finalement, il a seulement été mis à l’écart, mis de côté pour protéger une mère un peu trop jeune, effacé peu à peu d’une mémoire familiale. Finalement, c’est peut-être l’histoire d’un oubli, d’une amnésie, d’un contexte politique, d’une négligence de famille.
Production déléguée : L’infini turbulent
Mise en scène et texte : Karen Ramage
Collaboration à la mise-en-scène et direction d’acteur : Jean-Luc Vincent
Dramaturgie et co-écriture : Jalie Barcilon
Interprétation et manipulation : Marie-Laure Bonnin et Karen Ramage
Création plastique et marionnettes : Marie-Laure Bonnin, Karen Ramage, Léa Debenedetti et JBC
Costumes : Sonia Bosc
Son : Pascal Bricard
Voix off : Sophie Daull, Jean-luc Vincent et Pierre Gramont
Lumières : Amanda Carriat et Nicolas Poisson
Aide au projet DRAC ïle-de-France, Espace périphérique de la Villette, Ville de Paris en partenariat avec le théâtre aux mains nues, le Vaisseau à Coubert
Dates de répétitions au TAG
- du 11 au 16 septembre 2021